COVID 19, le symptôme d’une société malade

Position du Collectif 88% sur la crise sanitaire

JANVIER 2022

La dernière intervention du président de la République (et son “envie d’emmerder”…) est dans la droite ligne de sa politique sanitaire depuis le début de la pandémie : faire peser sur la population la responsabilité de la crise. Ses propos sont inadmissibles et le but est de nous faire oublier les vrais responsables du développement de la pandémie et de désarmer toute critique ou mobilisation pour changer notre avenir commun.

Il est difficile aujourd’hui encore de connaître l’origine de ce virus. Mais la responsabilité des gouvernements et leur obstination à maintenir le cap de leur politique libérale au détriment de la recherche publique sont responsables du retard pris dans les traitements et de leur très inégale répartition sur la planète. Et de ce point de vue économique, la mission a réussi : le CAC 40 ne s’est jamais aussi bien porté. Le prix à payer pour les colossaux profits engrangés est terrible : malades par millions, morts par dizaines de milliers, soignants exténués, économies en berne et précarité croissante pour le plus grand nombre.

Comment oublier les hésitations ministérielles sur le port du masque ? Comment oublier que bien avant le COVID, l’hôpital public était en souffrance, pour cause de réductions budgétaires ? Comment oublier que même pendant la crise, le gouvernement continue à fermer des lits à l’hôpital, que les soignants ne se sont vus attribuer que des primes en lieu et place d’une véritable revalorisation de leur métier ? Comment oublier que la libre circulation des brevets de vaccins n’a pas été mise place et que les laboratoires s’enrichissent démesurément ? Comment oublier que les enseignant·e·s sont pour l’essentiel laissés à eux-mêmes condamné·e·s à appliquer des consignes sanitaires changeantes et souvent inapplicables ? Dans ces conditions, comment avoir confiance en ce gouvernement ?

Les données des tests des vaccins dans les protocoles d’homologation en cours et les données actuelles sur son efficacité montrent que la balance bénéfice/risque fait du vaccin, dans ce contexte d’urgence, une arme importante contre la maladie et particulièrement contre ses formes les plus graves.

Toutefois, c’est une erreur de réduire la politique sanitaire au pass vaccinal adopté définitivement par le Parlement le dimanche 16 janvier 2022. C’est une obligation vaccinale qui ne dit pas son nom. Cette politique fracture notre société, entre vaccinés et non-vaccinés, bafoue également la laïcité et les droits fondamentaux. Faut-il rappeler que le pass sanitaire s’applique dans les bars, les théâtres, les cinémas, mais pas dans les mosquées, les églises ou les synagogues ? Une partie de la population a peur, peur du covid ou peur du vaccin, mais n’est-elle pas tout aussi respectable ?

Pour sortir de cette crise sanitaire, en respectant notre intérêt collectif, il faut une réorientation politique complète :

Transparence et démocratie, convaincre et non contraindre, sont les seules manières de lever les doutes légitimes et les inquiétudes de nos concitoyen.ne.s et aussi de mettre en pièces les discours complotistes et leur instrumentalisation politique par l’extrême-droite. C’est la seule façon de trouver l’énergie collective pour lutter contre la pandémie.

La pandémie nous frappe inégalement selon notre place dans la société et dans le monde. Le rôle du gouvernement est de protéger les plus faibles d’entre nous, de relever les prestations sociales, le salaire minimum, les retraites, de doter les services publics des moyens dont ils ont besoin, pour le bien commun. Le gouvernement doit développer des politiques sociales et médico-sociales fortes, afin de, entre autres, renforcer avec consentement les taux de vaccinations des personnes vulnérables, âgées et immunodéprimées. L’argent ne manque pas, encore faut-il vouloir aller le prendre dans les quelques poches où il s’accumule et lutter réellement contre la fraude et l’évasion fiscales qui se chiffrent en dizaines de milliards d’euros chaque année. Dans l’immédiat, comme le recommande l’OMS, le gouvernement doit également agir de façon solidaire en ne survaccinant pas au détriment d’autres pays. Sans un accès équitable aux vaccins cette pandémie risque de s’éterniser. Le gouvernement doit aussi exiger la levée du secret des brevets, investir massivement dans la recherche médicale publique, la production publique de médicaments et de vaccins, et remettre en place la gratuité des tests.

Enfin, cette pandémie n’est pas la première après le SRAS, Ebola, H1N1. La covid est un avertissement dans l’entrée dans “l’ère des pandémies” et notre devoir politique est d’alerter sur la nécessité de penser dans le présent les politiques de longs termes et de sortie du système capitaliste.

Voici quelques phrases parmi les plus significatives extraites du communiqué de presse de l’IPBES (l’équivalent du GIEC pour la biodiversité et les écosystèmes) sur son rapport intitulé “Échapper à l’« ère des pandémies»” :

“Selon le rapport, réagir aux maladies exclusivement après leur apparition, par des mesures de santé publique et des solutions technologiques, et en particulier par la conception et la distribution rapides de nouveaux vaccins et de nouvelles thérapies, constitue « un chemin lent et incertain », jalonné de souffrances humaines et coûtant des dizaines de milliards de dollars chaque année.”

« Il n’y a pas de grand mystère sur la cause de la pandémie de COVID-19, ou de toute autre pandémie moderne », a déclaré le Dr. Peter Daszak, président de EcoHealth Alliance et de l’atelier d’IPBES. « Ce sont les mêmes activités humaines qui sont à l’origine du changement climatique, de la perte de biodiversité et, de par leurs impacts sur notre environnement, du risque de pandémie. Les changements dans la manière dont nous utilisons les terres, l’expansion et l’intensification de l’agriculture, ainsi que le commerce, la production et la consommation non durables perturbent la nature et augmentent les contacts entre la faune sauvage, le bétail, les agents pathogènes et les êtres humains. C’est un chemin qui conduit droit aux pandémies. »

“Le risque de pandémie peut être considérablement réduit en diminuant les activités humaines entraînant la perte de biodiversité, par une plus grande conservation des zones protégées et par des mesures réduisant l’exploitation non durable dans les régions riches en biodiversité. Cela permettra de réduire les contacts entre les animaux sauvages, le bétail et les êtres humains, et aidera à prévenir la propagation de nouvelles maladies, indique le rapport.”

Il est urgent d’en finir avec les promesses non tenues, les COP qui se succèdent sans effet, repenser notre agriculture, relocaliser l’économie, en finir avec le mirage de la croissance sans fin et s’engager véritablement vers la transition écologique.

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