ARTICLE 40 : OUVERTURE D’UNE ENQUÊTE PAR LE PROCUREUR

ARTICLE 40 : OUVERTURE D’UNE ENQUÊTE PAR LE PROCUREUR

Lundi 22 mai 2023, Franck Beysson, Christine Chevillard et Bernard Gerbot, nos trois élus au conseil municipal de Roanne ont adressé un signalement, au double titre de l’article 40 du Code de procédure pénale et de l’article L1111-1-1 du Code général des collectivités territoriales au procureur de la République de Roanne, Abdelkrim Grini.

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Ce signalement, c’est quoi ?

Cette procédure fait partie des droits et on pourrait même dire des devoirs de tout.e élu.e municipal.e. En effet, cette démarche, permet, sans que l’affaire ne prenne une tournure publique de signaler à la justice des décisions prises au niveau municipal, qui posent problème. Il n’est pas besoin de preuves formelles, ni de certitudes, seulement la conviction honnête appuyée sur un doute raisonnable, que la justice doit vérifier la conformité de certaines délibérations adoptées par les conseils municipal et communautaire, notamment sur des questions de conflits d’intérêts. C’est une exigence démocratique, que les élus, porteurs d’un mandat citoyen puissent exercer ce droit de contrôle.

Les délibérations en question sont au nombre de sept et portent pour l’essentiel sur des projets immobiliers d’envergure significative, et sur les transports publics.

A ce stade, nous choisissons de continuer de garder confidentiel le contenu précis de notre signalement afin de laisser toute latitude au Procureur et aux enquêteurs de rendre publique ou non plus d’éléments. Cela nous semble d’autant plus nécessaire que notre signalement indique des noms de personnes de l’exécutif et de personnes impliqués dans les marchés et transactions signalés que nous nous refusons de mettre publiquement en cause.

Nous nous en tiendrons donc à vous indiquer en fin d’article, les seuls éléments que la presse a pris la responsabilité de publier.

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Une démarche que nous n’avons pas choisi de rendre publique en juin 2023

Il nous faut rappeler que le Collectif 88% ne souhaitait pas à ce stade de la procédure, que l’affaire soit rendue publique. C’est la presse qui nous a contactés et nous ignorons comment elle a été mise au courant. Ensuite, dans les articles de presse, nous avons fait preuve de la plus grande prudence. Ainsi Franck Beysson déclarait dans l’article du Pays publié le 25.05.2023 : « C’est à l’occasion de notre bilan de mi-mandat que nous avons pu avoir une lecture avec un peu plus de recul de certaines délibérations, que nous avons en effet, pour certaines, votées. On s’est dit qu’il pourrait peut-être – et j’insiste vraiment sur le ”peut-être” et sur le conditionnel – y avoir des éléments derrière qui posent questions. »

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Une défense d’Yves Nicolin avec propos injurieux et annonce d’attaque en justice

M.Nicolin, contacté par le journaliste a répondu : « On sent que les prochaines élections approchent et que certains sont prêts à tout pour salir leurs adversaires. Cela est infamant et ridicule à la fois. ». Il dira un peu plus tard que notre signalement n’était qu’une « dénonciation calomnieuse » et qu’il comptait porter plainte contre nous pour ce motif.

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Plusieurs remarques à ces propos.

La première, c’est que M.Nicolin a une curieuse conception du calendrier électoral. À peine à mi-mandat « les prochaines élections approchent » !

Ensuite, M.Nicolin, si prompt à défendre les procédures légales dans certaines circonstances, ne semble pas respecter ce droit des élus, puisque quand ceux-ci en usent, ils sont taxés de malhonnêteté  intellectuelle [1]. Pour l’instant, rien ne nous indique que sa plainte contre nous a été déposée.

En tout état cause, là où nous affirmons avoir fait le strict nécessaire face aux éléments que nous avons eue en notre possession, Yves Nicolin (et d’autres[2]) nous accuse d’être (entre autres) malhonnêtes. Il y aurait donc litige à trancher entre 2 perceptions bien différentes de notre démarche.

Alors, comme l’indiquait le journaliste Pierre Olivier Vérot dans son article du Pays Roannais du 08/06/2023, il est bien évident que c’est « la justice [qui] aura en charge de [le] faire, soit en classant l’affaire sans suite, soit en ouvrant une enquête. [3]»

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L’enquête est la preuve de la légitimité de notre démarche

Rapidement après notre signalement, le procureur de la République de Roanne a décidé de délocaliser le dossier et il a été confié au Procureur de la République du Tribunal de grande instance de St Etienne, M D. Charmatz.

Celui-ci nous a signifié le 24 mai 2024, qu’il avait décidé d’ouvrir une enquête et donc de saisir la DZPJ DIPN de Lyon (Direction interdépartementale de la police nationale) et de confier le dossier à la Brigade de la criminalité financière de la DCOS 69 (Division de la criminalité organisée et spécialisée). Son collègue, le procureur de Roanne M.Grini avait indiqué dans l’article du Pays déjà cité  les raisons pour lesquelles un telle décision devait être prise : « Soit j’estime qu’il n’y a pas d’infractions caractérisées dans les faits qui me sont signalés et alors je classe sans suite ab initio*. Soit j’estime qu’il y a matière à approfondir et, a minima, je décide de l’ouverture d’une enquête. »

Il semble donc qu’il « y a matière à approfondir » au sujet des délibérations à propos desquelles nous avons alerté le procureur de la République.

La justice nous a donc donné raison sur ce point. Notre démarche était fondée. Cette décision d’ouverture d’une enquête est un démenti cinglant aux propos du maire qui comme encore dans un courrier adressé aux Conseillers Communautaires disait: « Les griefs concernant les 5 délibérations de la ville de Roanne sont dénués de tout fondement et constituent des dénonciations calomnieuses (…) » […] « Ce premier signalement n’est donc fondé sur aucune justification sinon celle de la malveillance à mon égard (…) Ce second signalement n’est donc lui aussi fondé sur aucune justification si ce n’est celle, encore une fois, de la malveillance. (…) Je condamne ces méthodes abjectes qui n’ont que pour objectif de me salir et avec moi salir les exécutifs et les élus de notre Conseil Communautaire. »

Nous pourrions donc attendre légitimement des excuses pour ces écrits et déclarations injurieuses tenus par M.Nicolin à l’égard de nos élus, mais nous savons que cela n’est pas dans ses habitudes.

Pour conclure, nul ne peut savoir à quel constat cette enquête aboutira et à ce stade il n’y a pas lieu de conclure à la culpabilité de quiconque. Il faut le rappeler, dès l’article du Pays du mois de mai 2023, nous sommes restés extrêmement prudents : « Nous avons signalé ces faits, mais c’est bien sûr au procureur de la République de définir les suites à y donner. Peut-être qu’il n’y aura pas matière à poursuivre et nous en prendrons acte. Nous n’avons aucune certitude, mais des questions. ».

Nous allons donc maintenant attendre sereinement que la justice fasse son travail, avec l’impression, sur ce dossier, de nous être acquitté, en toute responsabilité et en utilisant les droits que nous confère la loi, de notre mandat d’élu. 

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Annexe (extraits d’articles de presse)  :

«  Ils y citent des noms bien connus du monde politique et économique du Roannais. Des personnalités très en vue, notamment au niveau des programmes immobiliers. Il y a aussi une question concernant la délégation de service public pour les transports de l’agglomération. Autant d’informations qui sont à la disposition du public, soit par le moyen des comptes-rendus de conseils municipaux et communautaires, soit en consultant des sites internet d’informations légales sur les sociétés. » [4]

Quelques éléments sur les décisions visées par le signalement [5]

« Les élus 88% évoquent sept décisions prises ces dernières années par la Ville et l’Agglo. »

– « La première concerne l’inauguration de l’immeuble situé au 61 rue Denis-Papin à Roanne, porté par la société Immoprogest. Les élus disent ne pas disposer du compte-rendu de la réunion du conseil où s’est décidé le prix de vente. »

– « Le collectif évoque une cession de terrains au 35 quai Lherminier et d’un immeuble au 33 du même quai le 10 juin 2021, vente réalisée à la SAS Le Club des Trois, à un prix inférieur à l’avis de France Domaine. »

– « Les élus disent, là encore, ne pas disposer du compte-rendu de la réunion du conseil municipal où s’est décidé le prix de vente du terrain sur lequel ont été bâtis 17 logements dans l’ancienne école de la Livatte, avec neuf maisons de ville, projet porté par la SAS Bâti Foncier. »

Questions autour de cessions et marchés

– « Mention est également faite de la cession d’un ténement au 45, quai Commandant Lherminier à la SCCV Dock 45. Lors du conseil municipal du 15 septembre 2022, ce dossier avait été évoqué, détaillant la volonté du porteur de projet d’aménager un espace de restauration moderne et des bureaux. Le prix de vente était de 340.000 €. »

– Une autre délibération concernant une cession de parcelles au 32, quai Commandant-Lherminier, toujours à la SAS Le Club des Trois, est mentionnée.

– À Roannais Agglomération, les élus auteurs du signalement reviennent sur la décision de cession du bâtiment Leclerc, sur le site de l’Arsenal, vendu par l’Agglo pour 3,4 millions d’euros en 2021 à la société Anahome, revendu 7 millions d’euros neuf mois plus tard. Les élus de 88 % rappellent que la société Anahome porte le projet des Halles à Mulsant, ainsi que le projet immobilier Les Loges, dans le même quartier.

– Enfin, les élus rapportent qu’ils avaient fait une observation, en conseil d’agglomération, sur la délégation de service public des transports à Transdev, dont un cadre qu’ils qualifient de responsable de la gestion de la délégation a succédé à la gérance de la société 16 Stratégies à Yves Nicolin. Franck Beysson avait fait remarquer, le 25 mars 2021 que, « ramené au coût individuel du bus, Transdev était moins performant » qu’un de ses concurrents ayant répondu à l’appel d’offres.


[1] https://c.leprogres.fr/politique/2023/06/05/un-groupe-d-opposition-saisit-le-procureur-sur-de-possibles-conflits-d-interets

[2] https://www.le-pays.fr/roanne-42300/politique/il-fustige-lattitude-de-88_14334534/

[3] https://www.le-pays.fr/roanne-42300/actualites/yves-nicolin-annonce-porter-plainte_14321885/

[4] https://www.le-pays.fr/france-monde/actualites/des-deliberations-signalees-a-la-justice_14314629/

[5] https://www.le-pays.fr/france-monde/actualites/les-decisions-visees-par-le-signalement_14314630/

2 avis sur « ARTICLE 40 : OUVERTURE D’UNE ENQUÊTE PAR LE PROCUREUR »

  1. Bonjour,
    Merci beaucoup pour ce travail de fond et de transparence, d’autant plus que vous le faites bénévolement.
    Comme vous l’avez dit, l’enquête déterminera si ces décisions ont été régulières (dans l’intérêt de tous et toutes, du coup), ou pas.
    À M. Nicolin de faire avec.
    Bonne continuation.

  2. Merci pour votre travail qui fait vivre et grandir la démocratie… Comment se fait-il q’une élue démissionne alors que la justice n’a pas rendu son verdict,,,

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